Udaipur : chronique matinale

Réveil peu après l’aube, seules quelques gargotes ont levé leurs rideaux où se pressent les premiers clients. Odeurs de thé et de bétel, le premier chai du matin attendra.

En route pour les ghats, afin d’éviter la future foule de touristes, qui ne manquera pas de s’y presser dans les prochaines heures, la vision est idyllique depuis le pont piéton surplombant le lac : vision centenaire de cette Inde divisée, où hommes et femmes se baignent et puisent l’eau du lac, quand les femmes ajoutent la corvée de lessives à leurs ablutions matinales. Un couple de touristes est déjà sur place au moment où j’atteins la volée de marches menant à l’eau, je m’installe à l’opposé de la section réservée aux hommes. La partie féminine me fait pourtant rêver, avec ces drapés, rendus épais par l’humidité, et le jeu de lumière qui en découle. Mais la pudeur s’impose…

Il y a un sens très fort, et ma foi particulier, de la courtoisie en Inde, il peut s’écouler bien 15 secondes entre le moment où mon postérieur atteint le sol ou tout autre surface plane, et celui où une première personne viendra vous aborder.
Après ce repos bien mérité, cela ne manque pas d’arriver. S’ensuit les salamaleks locaux « what’s your name ? » , «  where do you from ? » , « nice hat ! » … le Panama équatorien semble fasciner la population locale malgré son piteux état. Ou serait-ce une façon d’aborder le chaland pour dérouler sa camelote… N’étant en Inde que depuis une poignée de journée, je me laisse encore quelques temps de réflexion, mais je crains de plus en plus que l’aspect du chapeau n’ait rien à voir là dedans !
Puis s’enchaînent, comme les journées précédentes, les monologues, ou presque, locaux sur la « luxury fashion » ou « haute couture », en français dans le texte pour certains, comble du chic… et de leurs boutiques presque attenantes aux ghats (Laura en a d’ailleurs déjà fait les frais les jours précédents). Enfin le fameux mot magique du coin, « Julie Densch (l’ancienne ou actuelle, je ne sais guère, patronne d’un célèbre agent secret anglais) wore clothes from my shop on Octopussy movie, you want to see the pictures ? ». Chaque personne rencontrée, de façon souvent assez involontaire de notre part d’ailleurs, n’a que ces mots à la bouche. Il semble donc que la magnanime actrice, ait choisi de porter un costume différent par plan séquence, afin de satisfaire l’orgueil de la horde locale de vendeurs.
Puis je m’interroge sur ce dynamisme indien, unique… des hommes de mon âge, déjà patrons et tailleurs accomplis, au moment du tournage du film… alors que dans mon immense lascivité, j’attendais toujours la conception ! Etre patron, aussi jeune, voilà un aspect qui devrait inspirer notre maharadjah à nous.
Pour la quiétude, je fuis les lieux et m’enfonce dans le veille ville… les vendeurs de tissus et tailleurs y sont aussi innombrables si ce n’est plus, mais hormis quelques regards amusés ou intrigués, on me laisse fort tranquille. Et c’est bien tout ce qui m’importe.

Alexis B.

 

 

 

 

 

 

2 thoughts on “Udaipur : chronique matinale

  1. Bien belles scènes que ces toutes premières heures de la journée au bord du lac.
    Avant la chaleur, la foule et le bruit, l’aube est, dans bien des cas, le meilleur moment de la journée pour appréhender et ressentir la beauté et la spiritualité des lieux.
    Ne vous en privez pas …. c’est magique.

  2. Chapeau (!) l’Artiste !

    Au-delà de ton aptitude photographique indéniable (et de l’œil qui la guide…), le récit est très agréable et attise la curiosité pour la suite…

    Merci !

    (Clap, Clap, Clap…)

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