La goguette s’agrandit

Quatre heures de bus nous attendent pour les 120 kilomètres qui nous séparent de Luang Prabang. Autant le dire tout de suite, on va devoir s’habituer à cette folle allure, quand on roule à 30 km/h au Laos, c’est que la route est bonne … et en plaine ! Pour la première fois depuis bien longtemps, nous avons une contrainte temporelle, Guillaume, ami d’école, nous rejoint ici même pour deux semaines de vadrouille. On arrive avec une journée d’avance et profitons du calme quasi léthargique de la ville. Situé à la rencontre du Mekong et de l’un de ses affluents, les quartiers attenants aux deux rivières sont un magnifique mélange entre temples bouddhistes, architecture locale faisant la part belle au bois et maisons coloniales. Nous y flânons lentement sous un ciel de plomb, profitons des bords de fleuve ombragés pour nous reposer ou bien servir de compagnon de jeu à une sacré chipie pas vraiment effrayée par les étrangers que nous sommes.

 

 

Avec l’arrivée d’un troisième larron, c’est toute la dynamique qui change pour nous ! Après six mois passés dans notre bulle, retrouver un ami délie les langues de nouveau, nous avons milles choses à dire et à raconter, lui aussi. On pourrait rester à parler autour d’une table pendant des heures … Et c’est exactement ce qui nous occupera pendant les 3 premiers jours, agrémentant l’activité numéro de la ville qu’est le coucher de soleil sur le fleuve, de plaisirs bien français : saint nectaire, tome à la truffe, chartreuse, morbier, comté (cherchez l’intrus). Quel bonheur de retrouver ces goûts et ces saveurs ! Et les odeurs qui vont avec, surtout sous 40°C.

 

 

Le troisième jour, nous sortons enfin de la ville, direction des cascades à une heure de transport en tuktuk. Les chutes de Kuang Si sont assurément le lieu le plus célèbre du pays, enchaînement de petites et moyennes chutes d’eau, au milieu de la jungle. Mais la particularité du lieu, c’est la couleur de l’eau, un bleu clair sublime qui rend le lieu vraiment magnifique. A notre arrivée sur place, pas de doute, nous ne serons pas seuls, mais rien d’étouffant non plus. Hormis pour les ours qui nous attendent à l’entrée du parc naturel. Ici, les ours sont traditionnellement capturés et enfermés en vue de récolter la salive de l’animal utilisée en médecine chinoise. Illégal mais lucratif, les ours disparaissent peu à peu de ces jungles. Le centre que nous voyons les arrachent de leurs ravisseurs pour les cloisonner dans un cadre qui nous apparût tous bien restreint pour un groupe d’ours conséquent.

 

 

Plus loin, on croise la première zone de cascades et de bassins. La réputation du lieu n’est pas usurpé, c’est magnifique ! L’eau est à la fois d’une couleur intense et d’une transparence parfaite. On remonte tranquillement les différents bassins, ayant décidé de faire le tour du parc afin d’élire notre piscine préférée. Nous longeons ainsi, rapides, cascades et autres arbres déracinés avec le bruit de l’eau qui enfle au fil de nos pas. Nous arrivons enfin devant la grande cascade du parc. Jurisprudence Iguazu oblige, c’est joli sans plus, au contraire des sublimes bassins. Laura étant mal chaussée, nous partons entre hommes atteindre le sommet de la cascade, entre sentier glissant et escalier cascade !

 

 

En haut la vue est belle, mais l’eau n’a pas encore été façonnée par les sédiments, on ne retrouve pas la couleur sublime, dommage ! Juste un sourire en coin quand apercevant la seule balançoire à touristes du lieu, quelle ne fût pas notre surprise d’y recroiser perchée une barbie adulte, qui avait déjà attiré notre attention et quelques railleries dans les venelles de Luang Prabang. On redescend rapidement pour retrouver Laura et retournons à une piscine sublime que nous avions trouvé déserte en chemin. Coup de bol, c’est toujours le cas, l’eau est fraîche mais quel plaisir de nager dans une eau pareille, jouant avec les courants pour se laisser porter ! Nous aurons même le loisir de nous faire retirer les peaux mortes par les petits poissons du bassin, assurément pas au goût de tous.

 

 

Le lendemain, nous partons vers le sud. Choix dicté par la beauté des paysages de la région et de sa relative proximité avec Luang Prabang. Les multiples constructions hydrauliques sur les fleuves rendant de plus en plus complexes la navigation fluviale, c’est un bus qui nous emmènera jusqu’à Vang Vieng. La réputation de la ville est on-ne-peut-plus sulfureuse, ou devrais-je dire était. Pendant une bonne quinzaine d’années, le lieu était célèbre pour ces pizzas à l’opium, ces australiens descendant des rivières sur de grosses bouées en picolant des bières, ou ces concours d’acrobatie sous amphétamines … Las, les habitants ont dit stop, l’état a fermé les lieux de débauches, nettoyé les rues et déployé un nouveau plan de communication. Ici on vient pour les sites naturels et pour faire du buggy. Aucun doute, cela marche, et une clientèle asiatique a remplacé la défonce occidentale.

 

 

Pour les paysages, rien de plus simple, un pont brinquebalant en bois nous amène sur une grande plaine entourée de falaises karstiques. On commence à les connaître, mais le contraste entre rizières vertes et falaises noires est toujours aussi saisissant ! Nous jonglons avec le mauvais temps, et en quelques tours de pédales nous sommes en rase campagne ! Pour quelques kopecks, on peut entrer dans des grottes et les visiter par soi même. L’idée est tentante, mais Laura a craqué à la vue d’une jolie araignée de bien belle taille. Ce n’est que partie remise ! On poursuit notre ballade dans cette sublime vallée, posons nos vélos et partons à l’ascension d’un point de vue. La montée est fatigante, car l’air est très lourd ce jour là, mais cela reste plus facile que nos derniers points de vues. En haut, notre regard embrasse toute la vallée, ses rizières, sa jungle et quelques éparses villages.

 

 

On continue notre ballade dans les environs, nous sommes bien seuls sur nos vélos. Alors que les buggys déchainent les foules, amenant sa cohorte de bruits de moteurs, ses nuages de poussière qui nous aveuglent à chaque rencontre, et les passionnés de vitesse qui vont avec. Pas certain que cela soit moins bruyant qu’un opiomane, mais passons. Après un petit riz frit, nous nous dirigeons vers un lagon bleu ! Historiquement encore un lieu de défonce, aujourd’hui des cars de coréens font la queue pour sauter d’une branche d’un arbre, servant de plongeoir, dans le bassin, le tout filmé bien sûr. Pour nous, cela sera baignade à l’écart de la foule et surtout visite avec Guillaume d’une immense cave. Comme souvent dans ces régions, la cave a beaucoup servi, pendant les bombardements américains, de maisons pour les habitants du coins. Et dans celle-ci on a de la place ! Outre un bouddha dorée, c’est plusieurs salles immenses, certaines d’un plafond suffisamment haut pour que nos frontales n’atteignent pas le plafond. Nous y passons un temps certain, en particulier pour retrouver le chemin de la sortie. Puis longue baignade dans une eau claire et calme !

 

 

Même si la ville n’est plus l’eldorado asiatique de la débauche pour les humains, les chiens eux semblent toujours à la fête. Attendant nos plats à un boui-boui, nous assistons à cette scène plus qu’étrange de câlin canin. Nous avions croisé un des membres de la bande en milieu de journée, coincé cul à cul avec une partenaire féminine suite à un rapport intime fini en ventouse. Ce soir, ils sont quatre et c’est un grand n’importe quoi que nous avons sous les yeux. Pour chacun de nous, une découverte bien surprenante de la bisexualité évidente de nos amis les chiens. Le tout agrémenté d’effet ventouse bien pratique pour faciliter la circulation locale. Effet de groupe (le nôtre, cette fois-ci) et hasard des lieux, il y a ici une “boîte de nuit”, facile à repérer tant elle offre gracieusement sa bande son à l’ensemble des commerces environnants. La clientèle est souvent plus apprêtés que nous, mais l’ambiance et les déhanchés furent clairement de notre côté … Ville nouvelle oblige, à minuit, tout le monde se retrouve dehors, plus aucun commerce n’est ouvert, et nous voyons bien moins de gens avinés qu’à la même heure dans nos bistrots parisiens préférés.

 

Alexis B.

2 thoughts on “La goguette s’agrandit

  1. Je suis content pour vous en lisant que le Laos a réussi à se préserver un minimum des débauches occidentales qui dégradent toute l’atmosphère de ces lieux exquis

Leave a Reply to Aurélien Buathier Cancel reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *