Jour 1 : De Nayapul à Hile
Levés à 6h, nous espérons monter dans le premier bus direction Nayapul, point de départ de notre premier trek. Mais comme nous l’avons bien intégré depuis, patience il faut acquérir, car le bus ne partira qu’à 7h30, et il mettra 3h pour atteindre notre destination.
Nous sommes en basse altitude et la chaleur est vite suffocante. En commençant la grimpette à 10h30, nous n’arrangeons pas notre condition ! Je n’ai pas pris de photos de cette première journée pour plusieurs raisons.
Le paysage est loin d’être remarquable puisque nous démarrons sur une grosse route en terre, empruntée par nombreux 4×4 qui nous envoient la poussière au visage, et la montagne, recouverte de forêts sur ses sommets arrondis, n’est pas très élevée. Mais surtout, le cagnard ambiant rend la montée très pénible. Je souffre énormément de la chaleur, et du poids de mon gros sac à dos. J’en profite pour m’asperger abondamment le visage d’eau à chaque fois que je croise une fontaine.
Alexis récupère une bonne partie de mes affaires dans son sac à dos pour m’aider à avancer. Mais après 3h de marche, je laisse tomber, le visage bouillant, l’impression d’être fiévreuse, et nous réservons une chambre dans un lodge à Hile. Il est environ 14h, nous commandons un plat de pâtes à la sauce tomate à se partager, qui s’avère vraiment mauvais. Mes larmes d’épuisement me coupent l’appétit, donc c’est Alexis qui en mange les trois quarts.
Nous filons dans nos lits individuels respectifs pour une bonne sieste. Lorsqu’Alexis se réveille, il part se balader, profiter des dernières lueurs avant la tombée du jour. Et moi je file à la douche, froide, comme ce sera le cas presque exclusivement. Je me sens mieux, et l’appétit revient. A 18h, nous mangeons notre plat de « Fried Rice with vegetables », avec plaisir. Et le dodo ne tarde pas à pointer le bout de son nez. Les sacs de couchage et les draps de sac défaits, nous lisons quelques instants avant de plonger dans une bonne nuit de sommeil.
Jour 2 : De Hile à Ghorepani
Petit déjeuner à 6h30. La chaleur de la veille nous a appris une bonne chose : mieux vaut parcourir la majorité du chemin avant que le soleil ne nous tape trop violemment sur le nez. Nous avons 6h de marche devant nous, et 1500 mètres de dénivelé positif, ça va donc grimper sec.
Et en effet, dès les premiers pas, nous démarrons un escalier en pierres qui n’en finira pas … La fraîcheur du matin nous aide très largement pour ce rude effort physique. Si, tôt le matin, nous n’avons croisé presque personne, à l’arrivée du premier village, c’est beaucoup plus vivant. Je suis impressionnée du nombre de restaurants / lodges au mètre carré par rapport à la petitesse des villages. On ne risque pas de mourir de faim à dormir sur des cailloux.
Après un petit Coca en haut de cette fabuleuse montée d’escaliers, nous reprenons le chemin qui cette fois, s’enfonce dans la forêt tout doucement. Les rhododendrons sont tous en fleurs, le ciel est d’un bleu éclatant, et la rivière ne tarde pas à nous murmurer son doux ruissellement et ses plus expressives chutes d’eau. Le ciel se cache sous l’immensité des arbres, et nous profitons de la fraicheur qu’ils nous procurent à cette heure déjà avancée. Nous longeons la rivière, et en profitons pour faire une petite pause à ses abords.
Enfin, après avoir encore et encore grimpés sur des escaliers plus ou moins accidentés, nous arrivons à Ghorepani. Nous trouvons un lodge plutôt imposant, au prix très honnête. Puisque l’on mange automatiquement dans le lodge où nous dormons, le prix de la chambre est toujours dérisoire (autour de 2 à 3€ la nuit pour deux). Les chambres sont toutes similaires : une petite pièce carré en bois, avec deux lits individuels, et une petite table au milieu pour les plus élaborées. Les douches (froides) et les toilettes sont toujours communs.
Exception faite ici car j’ai pu bénéficier d’une douche chaude. Grand « village » touristique oblige. En effet, Ghorepani est le point d’accès à la montée de Poon Hill. A 3200 mètres d’altitude, on peut avoir une vue 360° sur la chaîne des Annapurnas.
Alexis, infatigable, se décide à faire cette montée dans l’après-midi, juste après une dégustation de quelques Momos (raviolis népalais) pour reprendre des forces, espérant ainsi être seul au monde face aux monstres des montagnes. Le pari est réussi, il me dit que la vue est incroyable, et qu’il a pu en profiter seul. Je refuse de voir les photos, préférant me garder la surprise.
La soirée venue, notre lodge est pris d’assaut par un groupe de jeunes américains. Et qui dit groupe, dit premiers servis lorsqu’il est question de passer à table. Nous avions beau commander notre repas avant tout le monde, nous avons été servi à la fin, complètement affamés après cette rude journée.
Nous nous réchauffons près du poêle central, à côté du monsieur, semble-t-il propriétaire du lodge. Un indien est aussi installé avec nous, et nous discutons en attendant notre repas.
Enfin prêts, nous mangeons en silence notre Dhal Bat, gracieusement resservi. Nous testons l’alcool local, le Raksi, une sorte de vin népalais à base d’herbes, incolore. Le goût est assez étrange et nullement comparable à ce que mon palais à déjà pu goûter.
Il se fait tard, 20h, l’heure d’aller dans son sac de couchage. Je demande expressément des couvertures supplémentaires car le froid est saisissant.
Jour 3 : De Poon Hill à Chitre
Il est 4h50, le réveil sonne. Aujourd’hui, je fête mes 29 ans. Nous enfilons plusieurs couches de vêtements les uns sur les autres, installons notre lampe frontale sur la tête, et prenons nos bâtons de marche pour affronter la montée de nuit jusqu’à Poon Hill, afin d’admirer, comme des centaines de touristes, le lever du soleil sur la chaine des Annapurnas.
Nous partons vers 5h30. La montée se fait en 45 minutes, pas de temps à perdre. Nous sommes nombreux sur le chemin. Très vite, des zones enneigées rendent le parcours glissant. Merci les bâtons de marche ! Le ciel se teinte doucement et nous apercevons le sublime halo à l’horizon, jaune et rouge, sur un ciel bleu limpide. Pas de temps pour rester admirer cet effet, le soleil se lève et il reste encore de nombreuses marches à grimper. Je suis essoufflée, ne regardant que mes pieds, j’espère arriver en haut au plus vite…
Et voilà, nous y sommes. Alors que je n’avais jusqu’ici vu qu’un petit bout de sommet enneigé pendant les premiers jours de trek, je me retrouve au milieu des Annapurnas.
A 3200 mètres d’altitude, les géants face à nous sont immenses. Entre 7000 et jusqu’à plus de 8000 mètres, ces montagnes nous rendent minuscules. Et les lumières de l’aube sont sublimes. Nous restons là-haut à suivre les étapes du levé de soleil sur les sommets jusqu’à 7h30.
Avec un peu de retard (groupe d’américains devant être servis avant nous oblige), m’attend mon petit déjeuner d’anniversaire : des nouilles aux légumes. Absolument exquises, et la portion est énorme. Inutile de manger ce midi !
Nous quittons Ghorepani vers 10h, bien avant le groupe d’américains, direction Shika. Le chemin est tout à fait praticable, mais les abords sont parfois enneigés. Nous rencontrons beaucoup moins de touristes sur cette partie du trek, car nous avons décidé de ne pas faire la boucle habituelle de l’Annapurnas View. Au lieu de poursuivre vers l’est, nous remontons au nord.
Depuis l’œil du photographe.
Le temps est toujours aussi superbe. Les villages que nous croisons sont plus petits et ruraux. On y voit des cultures, des vaches, des chèvres et des paysans.
C’est très paisible. Nous avons décidé de ne pas faire une grosse journée de marche, c’est donc après 4h que nous nous arrêtons dans un magnifique lodge, installé au bord d’un petit chemin verdoyant. A peine 3 autres petites maisons nous entourent. Nous sommes les seuls touristes du lodge, et la vue est absolument incroyable ! Un bien bel endroit pour trinquer à un anniversaire inoubliable.
Nous mangeons un « Fried Rice with vegetables », encore une fois excellent ! Un petit Raksi pour terminer le repas, et nous allons nous coucher.
Jour 4 : De Chitre à Shikha
Départ à 7h45, après avoir partagé la même chose que la veille au soir pour le petit déjeuner. Nous redescendons vers le sud. Après quelque temps, arrivés dans un premier village, nous demandons notre chemin. Personne ne semble connaître la destination et nous font comprendre que nous ne sommes pas sur le bon chemin. On fait donc demi-tour, sans trop comprendre la carte et le GPS. Et nous finissons par littéralement tourner en rond, nous retrouvant devant notre lodge ! Le propriétaire propose alors de nous emmener jusqu’au chemin, ce qui me semble plutôt une bonne idée, a priori.
Il nous fait prendre des raccourcis à travers champs et nous grimpons à vitesse folle. Je suis éreintée et je n’arrive pas à suivre. Les népalais sont assurément plus habitués à marcher que nous.
Nous grimpons une colline et il nous confirme que nous sommes sur le « chemin » à prendre. Je ne comprends pas, je ne vois pas de « chemin » sur cette vaste colline qu’il faudrait grimper. Inquiète et essoufflée, nous nous arrêtons un moment. Je ne le sens pas, et je doute fortement. Nous avons déjà perdu beaucoup de temps dans la matinée en nous trompant de chemin, je n’ai plus très envie de poursuivre dans cette direction. Après discussion houleuse, on fait demi-tour … Et quelques buffles ont décidé de brouter l’herbe sur notre soit-disant « chemin » en attendant.
Eternelle trouillarde des animaux en tous genres, je balise. Lorsqu’on s’approche des buffles et de leurs grosses cornes, l’un deux s’approche de nous puis s’arrête, nous regardant fixement. Mes jambes deviennent du coton, « Alexis j’ai très très peur, qu’est-ce qu’on fait ? », n’arrêtant pas de fixer le buffle, de crainte qu’il ne s’approche davantage. Alexis suggère que nous nous mettions un peu en hauteur sur une butte. Dès que le buffle semble détourner son attention, nous descendons et marchons au pas de course pour l’éviter.
Ce petit contretemps m’a bien refroidie, et j’ai du mal à détourner mon attention pour admirer le paysage. Nous décidons de ne pas marcher trop longtemps, et au bout de 4h, nous nous arrêtons dans un lodge, accueillis par une charmante dame. L’ambiance n’est pas au beau fixe après les épisodes de la journée. Mes peurs restreignent le programme, et Alexis ressent une frustration certaine.
Pour calmer nos émotions, nous décidons de nous poser dans la pièce à vivre, accompagné d’une bière et de quelques parties de Yam’s qui finissent par nous dérider. Il n’y a pas que l’humeur qui fut orageuse ce soir-là, car à la tombée du jour, les gros nuages ont occupé le ciel et une forte pluie s’est abattue sur le village.
Nous commandons des Momos végétariens à la dame qui nous serons servis pour 18h30. Celle-ci part cueillir, directement de son jardin, oignons et feuilles d’épinard pour préparer la farce des raviolis. On ne peut pas faire plus frais et local ! Et c’est un vrai régal. Les raviolis ont énormément de goût malgré le peu d’ingrédients qui les composent. Nous la félicitons pour sa cuisine. Elle nous remercie, la bonté et la gentillesse émanant de ce regard rieur.
Jour 5 : En route vers Tatopani
Dernier jour de trek. Ce matin, il pleut. Alors que nous mangeons notre riz frit aux légumes et notre thé habituels, nous espérons que l’orage sera de courte durée. Gagné. Nous partons, la bâche de pluie couvrant nos sacs à dos au cas où. Nous avons passé la journée à descendre pour atteindre la vallée.
Il a rapidement fait chaud, et nos genoux ont souffert des escaliers. Nous avions une jolie vue sur les sommets pour accompagner notre marche, et de beaux arbres en fleurs. Je ne connais pas ces fameux arbres, et je n’en avais jamais vu auparavant mais ils sont vraiment superbes : aucunes feuilles ne les couvrent, comme s’ils étaient morts, et pourtant de sublimes et imposantes fleurs d’un rouge chatoyant habillent ses branches. C’est stupéfiant.
Nous arrivons à Totepani, où nous savourons une bière pour fêter la fin de ce premier trek en attendant le bus nous emmenant à Pokhara.
Bus qui ne viendra jamais, nous partons donc en Jeep avec trois autres hommes. Le chemin est incroyablement long et pénible. Pokhara n’est qu’ à 120 kilomètres, mais il nous faudra 7h pour l’atteindre. Le chemin n’est que bosses, flaques d’eau et gros nuages de poussière. On sautille sur le siège constamment, et l’air devient de plus en plus irrespirable à cause de toute cette poussière ramenée dans les airs par les roues des véhicules sur le chemin.
Alors qu’Alexis avait proposé de m’inviter au restaurant pour fêter mon anniversaire à Pokhara, nous repousserons cette charmante invitation au lendemain soir, le trajet en Jeep ayant épuisé le nombre d’heures nécessaires pour un tel programme !
Laura B. texte et photos couleurs
Alexis B. photos noir & blanc
bienvenue au coeur des cieux..
royaume des éternels et des merveilleux 😉
petits poucets que vous êtes, vous marchez sur des chemins “interdits” dûment voulu !
ainsi soit-il.. marchez!!! le plus haut possible, toujours sans crevez en route…,
pas de réparateur de souffle ou de jambles sur le chemin, juste les yeux toujours les yeux. Seuls chaque pas est guidant et sécurisant pour la suite de l’appréhension du nouveau..
le truc que l’on a pas à Paris !!
Ce tout, qui fait que l’on se ressent enfin et encore joyeusement vivant 😉
En effet, lorsqu’on est fatigué tout est dans les jambes et surtout dans la tête 😀 mais pour avoir la chance de voir de si beaux paysages, ça vaut le coup !
C’est avec plaisir et un peu plus de sérénité que nous vous retrouvons (enfin !) et qui plus est, au beau milieu d’un site des plus grandioses !
Remarquable et emblématique ce cliché souvenir N&B de tes 29 ans !!!
Superbe également cette improbable pose du “Grand moustachu” de l’Annapurna … et qu’elle chance d’avoir découvert la fameuse “petite maison bleue accrochée à la colline”.
Les efforts permanents qu’il vous faut déployer pour progresser dans cette aventure trouvent ici leurs récompenses. J’espère que vous allez pouvoir prendre le temps d’en pro-fi-ter …
Encore BRAVO pour les photos … et j’imagine que, dans vos reportages, vous incrustez aussi quelques indispensables pépites vidéos (?)
Merci ! Oui les photos d’Alexis sont très jolies 🙂 on verra pour d’éventuelles vidéos lors de nos prochains treks. Bisous
Encore une fois quel récit … on visualise tout à fait certaines péripéties 😉
Alex un grand bravo, organiser tout çela ne doit pas être chose aisée, assurer le portage en plus …chapeau 👍🏼
Laura quelle journée inoubliable pour ton anniversaire…il y a eu de gros efforts à fournir, un peu de tension… mais aussi tant de bonheur, les photos en sont l’illustration !!!
Maintenant prenez bien le temps de récupérer à Pokhara, vous l’avez amplement mérité 🛀🏻🚣🏻♀️🥂
Bisous.
Merci Annick ! Il faut parfois souffrir un peu pour avoir la chance de voir ses sublimes paysages 🙂
Il a bien meilleur goût l’anniversaire, hein ?!
Et en plus elle a pu manger des pâtes. Pfffff, franchement indécent.
Ça donne tellement envie que c’est presque parfois difficile à lire… je vous jalouse 😒
Oui c’est difficile la montagne mais tellement gratifiant. Et, au Népal, le confort et gentillesse sont de la partie…
Un paradis.
Oui je me souviendrai assurément de mes 29 ans ! Bon c’était des nouilles asiatiques, pas italiennes non plus 😅