Un petit goût de fin du monde

Au Vietnam, il y a vraiment deux moyens de transports. Le premier confortable, rapide, direct ne relie que les endroits très fréquentés. Tout commerce, quelque soit son type est à même de fournir un billet de bus entre Hanoi et Hoi An. Quand souhaitant prendre la poudre d’escampette, on cherche à atteindre un endroit reculé, ce n’est plus la même histoire. Hôtels, agences de voyage… tous ne nous proposent que la voiture privée pour atteindre l’île de Ly Son, seulement distante de 120 kilomètres. Notre hôte nous propose finalement un bus partant à cinq heures du soir et arrivant après vingt deux heures … le rythme népalais sur les plaines vietnamienne, ça sent pas très bon tout ça ! Et je n’ai aucune envie de passer une autre journée à Hoi An, tant seule la ballade fort matinale est plaisante.

 

 

Après maintes discussions entre nous, on se lance par nos propres moyens. Nous quittons l’hôtel à bord d’un taxi direction un petit village à quelques kilomètres d’Hoi An, avec comme objectif d’héler un bus depuis le bord de l’autoroute. Le chauffeur ne semble pas surpris de notre demande, c’est bon signe. Sur place, ouf, nous ne sommes pas seuls, deux groupes de personnes attendent comme nous leurs bus qui les mènera au sud. Et qui dit lieu de vie au Vietnam, dit café. Posée à même le bitume de la sortie d’autoroute, la terrasse, ombragée d’un treillis, fait office de salle d’attente pour les locaux. Moins d’une demie heure plus tard, nous sommes dans un bus, direction Quang Ngai, seconde étape de notre périple. Deux heures plus tard, nous sommes déposés prestement à un carrefour où les taxis nous assaillent dans la seconde. Pour éviter cela, on file se poser à la terrasse d’un café, qui nous garantit un peu de calme pour reprendre nos esprits et décider de la marche à suivre. On sait que des bus locaux peuvent nous déposer sur le front de mer, mais de là à se faire comprendre … finalement, c’est un homme du restaurant voisin qui nous emmènera sur son scooter, trois personnes, trois sacs dont deux très gros, attelage peu conventionnel (du point de vue français) et plutôt éprouvant pour faire vingt cinq kilomètres. Peu importe, nous arrivons à bon port, sans mauvais jeu de mots. Nous prenons nos billets pour le prochain ferry, une heure après. Contrôle douanier, interrogation sur notre visite … La zone semble être dans le radar chinois et se trouve donc fort surveillée par les autorités locales. Le bateau est bien rempli, nous serons les seuls occidentaux. Après la frénésie des soirées précédentes, quel changement ! La mer est agité au cours de cette heure de traversée mais bizarrement les locaux semblent moins souffrir des vagues que des trajets en bus. Il n’est pas quatorze heures que nous posons les pieds sur Ly Son, que c’est bon de voyager plus rapidement par ces moyens !

 

 

Une simple jetée en béton avec en arrière-plan un petit village, qui s’avérera le plus imposant de l’île. Les quelques constructions imposantes, toujours des hôtels, ne dépassent pas les trois étages. Longeant le front de mer, nous jetons notre dévolu sur un établissement au hasard. De la chambre, nous n’aurons pas la vue sur mer, mais le toit terrasse offre une vue sublime. Premier constat immédiat, à cette heure-ci les rues et ses habitants sont assoupis. La vie est quasiment absente si ce n’est les rares vendeuses de thés de la rue principale. Ambiance de bout de monde, on retombe de suite dans l’ambiance de Tarrafal (sur l’île de Santa Antao au Cap-Vert), ici le soleil guide la vie ou plutôt la sieste. On flâne sur la côte ouest, tentons de grignoter un peu pour notre premier repas de la journée. Manque de pot, c’est du poisson, je resterai donc en jeûne, quand Laura profitera de la double portion. Deux boui-bouis se font face, c’est le seul endroit du coin. Et pour cause, une arche minérale se love en contrebas de la falaise. Tout sauf impressionnante, on la délaisse bien vite pour une baignade au milieu des rochers et quelques portraits de pécheurs à pieds. Pour les touristes locaux et les convois de minibus qui vont de pair, c’est séance photo obligatoire, au dessus de l’arche, tentant de « prendre le soleil couchant dans leurs mains ». De notre côté, nous profiterons des dernières lumières avec dans nos mains … des bières !

 

 

Le soir, dégustation de fruits de mer dans un petit restaurant local. Qu’il est difficile de comprendre leurs cartes, heureusement que les viviers dans la rue et des photos nous permettent de choisir convenablement ! Excellents calamars, ça fait plaisir. Le lendemain, on prend un scooter et découvrons l’île. Volcanique, celle-ci comporte trois cirques. Malheureusement, lieu stratégique oblige, les installations militaires aux points culminants n’incitent pas à la découverte. Nous flânerons donc sur la plaine, au milieu des cultures typiques, oignons et ails poussant dans le sable, créant un très beau paysage, avec ces innombrables rangées de pousses vertes sur le sable blanc. Revers de la médaille, la culture nécessite un grand volume de sable prélevé sur les côtes qui souffrent aujourd’hui très fortement de l’érosion. Au point que la côté sud est aujourd’hui protégée par un remblai bétonné.

 

 

Au Nord de l’île, une plage de roche offre un décor impressionnant, la crique nichée au bord d’une falaise verticale. Avant d’arriver là, on croise plusieurs boui-bouis, qui, fin de saison oblige, sont presque tous fermés. Treillis volant dans le ciel, cuisine ouverte abandonnée … A l’ambiance de bout du monde s’ajoute celle de fin du monde. Sur la plage, c’est plutôt la fête, un groupe passant son temps à faire des photos de groupes dans l’eau, sur les rochers, sur le sable ! Moquerie de ma part peut être, mais que cette joie m’apparaît feinte !

 

 

On enfourche le scooter de nouveau, l’averse nous tombe dessus, on fonce alors et nous arrêtons à la terrasse d’un café. Puis d’un restaurant où l’on se fait arnaquer sur le prix et le poids du très bon poisson que Laura a choisi. De mon côté, je n’aurai pas le plat commandé, me retrouvant avec une plâtrée d’épinards baignant dans l’eau. Puis sieste au moment des grosses chaleurs et ballade à pieds pour cette seconde après midi. Comme la veille (et les jours qui suivront), une brume épaisse est présente sur le Vietnam continental, nous empêchant de profiter des couchers de soleil comme il se doit.

 

 

Les jours avançant, nous sommes de plus en plus raccord avec l’ambiance locale. De longues heures à l’ombre des cafés, regardant la vie passer tout en refaisant le monde, des ballades lentes, écrasés par la chaleur, pour découvrir ces ruelles ensablées. A midi, il nous faudra faire plus de trois kilomètres pour découvrir un endroit nous proposant un repas simple, en face du collège. Cela doit être la cantine, avec tabourets et tables en plastique pour nains de rigueur. La chaleur est véritablement suffocante ce jour là, alors quand on découvre une terrasse à l’écart de la route et ombragée par de nombreux arbres, on s’y jette à cœur joie.

 

 

Pour cette ultime soirée, nous mangeons sur l’eau, dans un restaurant flottant du port. Ici point de frigo, ni de légumes, nous ne verrons même pas de riz. Seuls les viviers s’offrent à nous. Nous jetons notre dévolu sur un énorme poisson et des coquillages inconnus. Tout sera succulent et bien arrosé de bières locales …. Pas de doute, nous sommes dans le sud, nous avons perdus nos repères, les marques de bières du Nord n’existent plus faisant place à des bières bien différentes, ou presque ! Nous avons dit adieu à la Hanoi beer, à nous la Saigon beer ! Dernière nuit sur place, avant notre départ. Même endormie, Ly Son est appelé par les locaux la « grande île ». Demain matin, une frêle esquive nous mènera à la découverte de la « petite île ».

 

Alexis B.

2 thoughts on “Un petit goût de fin du monde

  1. Votre périple vietnamien semble se poursuivre dans la logique que vous avez initiée avec ruse et clairvoyance.
    Nul doute que votre suite sera attachante… votre prochain article devrait offrir encore plus d’authentisme.

    1. Nous sommes en effet séduits par la diversité du pays, la gentillesse des gens dans ces coins si peu habitués aux touristes… on ne se comprend pas, si ce n’est avec le sourire… et une touchante générosité !

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